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Environ 75% des Américains boivent du café*. Prendre son café sur la route ou délecter un café potable – le chauvinisme parle - n’était pas inscrit dans les mœurs jusqu’à l’immixtion d’un acteur majeur…Starbucks.
La chaîne est parvenue à modifier les comportements et à faire accepter, par le truchement d’un positionnement upscale, des prix élevés. Elle a imposé le café en tant que lieu de socialisation. Son avancée vers la premiumization a affecté l’ensemble du marché.
Seulement voilà, la conjoncture économique est loin d’être propice à l’achat d’un café à 5 dollars, que celui-ci s’appelle Frappuccino, Mochachino ou Starbuckchino. Starbucks va mal, on le sait bien.
Ses ennemis : McCafé, Dunkin’ Donuts et bien d’autres. Tout ce beau monde s’attaque ouvertement par campagnes interposées.
Deux ans auparavant, Dunkin’ Donuts, marque à l’image bien plus prosaïque (« America Runs on Dunkin’ ») lançait l’assaut. Son arme : une campagne singeant Starbucks et sa politique de naming.
La crise et la propagation agressive des Mccafé n’aidant pas, la bagarre monte crescendo depuis peu, comme l’illustre la campagne de McDonald, en mai dernier :
La réaction de Starbucks ne s’est pas faite attendre. Voici le message que me délivre la marque, lors d’une promenade dans Chelsea, entre deux galeries d’art :
Le plus frappant à mon sens:
« We think making coffee is an art form, They think it’s a new revenue stream ».
Starbucks se laisse prendre dans l’engrenage de la guerre concurrentielle, diluant un peu plus son positionnement éthique originel et parvenant presque à donner raison à ses concurrents. Brève analyse.
1 – La tagline
Sur le mode « It’s not TV, it’s HBO », nous avons donc désormais « It’s not just coffee, it’s Starbucks ».
Tout comme HBO, Starbucks est un pionner, à une grande différence près, celle de la catégorie. Changer les règles fondamentales de l’entertainment et affirmer qu’on ne fait pas de la télévision mais du cinéma adapté au petit écran fait sens. Bouleverser le marché du café, bien de consommation courante, n’est en rien comparable. L’intérêt du consommateur est bien plus limité – à l’exception près d’une poignée de fanatiques. Face à cette tagline, la prétention décriée par tous saute aux yeux.
2 - La body copy
Le café est érigé en art. Le raccourci hâtif entre art et art de vivre passe encore. Mais je doute de sa pertinence au moment même où Nespresso, beaucoup plus établi dans le monde de l’art, s’implante aux US et propose des installations artistiques dans ses pop-up stores. Les actions en disent plus long que les mots, gardons-le bien en tête.
« Pour nous c’est un art, pour les autres c’est une façon de plus de générer du profit ».
S’agit-il de sous-entendre ici que Starbucks est une organisation philanthropique et militante…en faveur du café ? Face au comble de la mauvaise foi, le consommateur n’est pas dupe.
Quelles leçons faut-il tirer de cette vaine querelle en dehors de cette réponse peu efficace ?
Les faits démontrent à quel point l’industrie se regarde le nombril, incapable de considérer “the full picture”. Sous l’emprise d’une certaine myopie concurrentielle, tous les efforts marketing se déploient contre les concurrents directs, omettant au passage des menaces de fond.
Les jeunes Américains tendent par exemple à percevoir le café comme une gourmandise*. Red Bull ou Monster deviennent des produits de prédilection pour pallier leurs besoins d’énergie. Pendant que chacun court sans prendre la peine de regarder sur le bas-côté, le café perd doucement de son association spontanée à la dose d’énergie matinale.
La nouvelle génération posera bientôt un défi de taille : le problème de diminution de la consommation de la catégorie café toute entière. Il ne sera plus alors question de se battre pour des parts de marché mais pour modifier des habitudes et comportements. Je suis prête à parier que les marques en question se rappelleront alors que les consommateurs sont leur partenaires…Un peu tard.
*The coffee Market, Mintel report, Septembre 2008
Lire aussi sur le blog de Naked New York : The Coffee War by Diana