dimanche 17 mai 2009

Lomo vs. photo



Une de nos petites modes arty : la photo hip/hype, c'est comme tu veux. Sa manifestation la plus frappante : la Lomography.
La Lomography, avant tout une marque devenue une pseudo philosophie, Don't think, just shoot. Un appel à la photo non réfléchie donc potentiellement bâclée.

Une série de règles pour finir par proclamer l'absence de règles :
  1. Take your camera everywhere you go.

  2. Use it any time – day and night.

  3. Lomography is not an interference in your life, but part of it.

  4. Try the shot from the hip.

  5. Approach the objects of your Lomographic desire as close as possible.

  6. Don’t think. (William Firebrace)

  7. Be fast.

  8. You don’t have to know beforehand what you captured on film.

  9. Afterwards either.

  10. Don’t worry about any rules.


Le Lomo, c'est la gloire de la photo gadget, branchée et brandée. Je suis en colère contre l'éloge de la fin de la mise en scène qui n'atteint pas pour autant la portée du reportage.

La figure de Terry Richardson cristallise ma colère - il faut toujours trouver quelqu'un pour la déverser. Il ne shoote pas au Lomo mais soutient cette ligne de conduite.


Il te mange le cerveau en te faisant croire que l'esthétique cool, c'est le trash. Le trash, non pas la technique au service d'un véritable propos artistique. Le trash isolé. Le trash qui vend.



Si je ne pense pas changer d'avis sur Terry, j'essaye de nuancer mes idées sur le Lomo. Il est toujours un peu facile de cracher sur tout ce qui est branché.

Dylan le dit, la lomography, ce sont aussi des appareils accessibles qui font vivre l'argentique. Quand tu regardes les photos Lomo, tu peux aussi penser que toutes ces tentatives de création forment un mouvement respectable - même si ton esprit élitiste continue de se dire que la vraie photo n'est pas là.
"Le lomo, aidé par des pellicules pro, nous a prouvé que n'importe qui pouvait prendre de belles photos, avec n'importe quoi". Ok, le Lomo a la capacité de faciliter la circulation et la démocratisation de l'argentique, on ne peut pas lui enlever.

Certes, constater que l'argentique ne meurt pas est plaisant.
Je n'ai rien non plus contre l'idée de "Monsieur Tout le Monde Photographe" mais :

1/ Le lomo en tant que gadget communautaire de branchés est loin de s'adresser à tous, le discours autour de l'argentique mainstream n'est donc pas valable.

2/ Du coup, les productions de "Monsieur Tout le Monde Photographe Branché" ne sont pas prises pour ce qu'elles sont; elles définissent l'esthétique cool en éclipsant des démarches plus construites et plus riches.

Le relativisme, le "toutes productions artistiques se valent", qu'il soit hip ou non, manque cruellement d'exigences et d'idéaux.

[Merci Dylan et désolée d'avoir dénaturer ta pensée, mettons ça sur le dos de l'absence de contexte]



4 commentaires:

Unknown a dit…

Un élitiste ne peut pas blâmer une élitiste.

Et je te rejoins volontiers s'il te tente de programmer un apéro-pogrom anti-hipster, nos amis dj sachant tout à fait l'accompagner par une ballade d'un petit génocide dominical bucolique.

Mais il faut laisser la porte ouverte, même dans un texte punching-ball.

Tu n'aimes pas Terry. Certes.

Mais on peut aimer Crewdson, Jeff Wall, Jean Paul Goude voir LaChappelle tout en restant disponible à autre chose.

Tu parles de mise en scène, tous ces photographes ne mettent pas seulement leurs photos en scène, mais aussi leur vie. C'est pourquoi je pense que Larry Clark, Nan Goldin et part Exemple Barbara Crane (une femme photographe que je viens de découvrir et à laquelle je t'invite de faire de même, au moins au motif de solidarité artistique féminine que tu défends) font aussi de la mise en scène. Faire du reportage sur sa propre vie mise en scène , même si c'est comme elle est, c'est faire aussi des photos mises en scènes.
et on se fout un peu des appareils.

Et si Robert Frank avait fait la série The Americans en lomo?

Que tu pestes contre des gens qui s'en foutent de la photographie et qui ont autour du cou un objet fluo de consommation pour une certaine image, certes.
On peut critiquer des gens qui ont une vie sans grand intérêt et qui la reporte sans talent sans même se soucier avec quel objet ils témoignent.

Mais on ne peut pas critiquer un médium.

De toute façon, ne cherche pas, tu ne trouveras personne qui aime la photo capable de bruler un lomo.
Même moi qui suis un fanatique intégriste de la Tri-X, il m'arrive même de conseiller des amis qui veulent acheter un appareil numérique.

Parce que l'important c'est de faire des images (et de les partager si on a le temps et les moyens).

PS: j'ai rencontré un musicien de syd matter, aussi sympa que leurs chansons, mais ça c'est juste pour te mettre la N.

Chloé a dit…

Cher Dylan,

J'aime le désaccord, mais je l'avoue, ce que j'ai écrit ici n'est pas très clair.

Je ne blâme pas le Lomo en tant que médium.
Je blâme le Lomo en tant que symbole.

Je me fous de la lentille et de la machine, c’est l'adoption d’une gamme de produit promu marque branchée qui me dérange. Pourquoi l’engouement m’énerve-t-il?

Parce que je me fous de l'appareil. Or, lorsqu'il devient branché, l'objet devient la quête ultime. L'enjeu artistique risque de se réduire à une simple possession matérielle.

Il est de ton plein droit d'affirmer qu'"on ne peut pas critiquer un médium", je suis dans le mien de penser que quand celui-ci devient une fin, il est indispensable de le remettre en cause.
Il n’est pas question d’assassiner le medium lui-même mais l'écosystème dans le lequel il est imbriqué.

Cet écosystème dépasse celui du marketing et de la mode, c'est celui qui fixe les conventions du marché et des institutions culturelles.
Première chose que je vois en arrivant au Moma: un mur de Lomo fait par des "lomographers" -appellation témoignant du ridicule de la revendication. Pourquoi cette sélection ? Ces gars détiennent des Lomos. A défaut d'avoir un œil, ils ont un appareil cool. Ils sont cool.

Oui, il est possible que cet œil et l’appareil Lomo deviennent amis et fassent des choses différentes mais en dehors de l’enclos de la hip. Car dans le cas du Lomo cette hip est l'enclos non pas d'un médium mais d'une marque.





PS: Quel musicien? Peu importe, je te déteste.

Chloé a dit…

...Celui que je préfère?

Unknown a dit…

en fait je crois qu'à Paris, ou du moins pour ma part, on est très loin de la pression de la "hip".
on est parisien et français, donc tout les artistes encore vivant ne nous interresse pas encore, nos exposition phares sont Kandinski, Calder, Blake, Chirico. Que des petits jeunes qui commencent. Les fluos kids sont ridiculisés (à tort ou à raison)et les "cool" du moment c'est des mec qui viennent de découvrir les "fixies" (vélos à pignons fixe popularisés à New York il a 15 ans).

Grâce à ta précision, je suis tout à fait d'accord avec toi.

et je t'envie presque.
Le seul symbole qui se veut cool ici mesure 1m62 et est produit dérivé de Hongrie.
Et je n'en peux plus de cette marque.

http://www.lepost.fr/article/2009/05/18/1540910_et-carla-bruni-sarkozy-lanca-bon-courage-chouchou-a-nicolas-sarkozy.html#xtor=ADC-218